Souleymane Koïta de la mairie de Siguiri aux syndicats des conducteurs de mototaxis de Siguiri : « Personne ne doit prendre la taxe de l’État à la place de l’État…» ( Interview exclusive)

http://Actuguinee.org / Inflexible dans la conduite de ses réformes, la délégation spéciale de la ville de Siguiri, à peine installée, marque déjà des points suscitant l’adhésion de bon nombre de ses concitoyens. Mais, ce nouveau mode de gouvernance locale estampillée ‘’ refondation de l’Etat » entraîne aussi des réticences de certains acteurs locaux qui se montrent de plus en plus menaçants.

Derrière toutes ses réformes innovantes, se cache une équipe dynamique avec à sa tête,  le docteur Moussa Keïta.

Pour en savoir davantage sur ses questions éminemment juridiques, nous avons  tendu notre  micro à Souleymane Koïta,  vice-président de ladite délégation spéciale.

A bâton rompu ,ce jeune juriste de formation académique,  dévoile le bien-fondé de cette gouvernance new-look.

Est-ce qu’on peut savoir les grandes réformes que vous avez engagées au sein de la mairie de Siguiri depuis que vous-êtes aux affaires ?

Depuis notre installation [ 28 juillet 2022] , il était question de procéder à ce qu’on appelle le diagnostic interne. Ce diagnostic interne consiste à faire une évaluation sur la quantité et la qualité des ressources humaines que la commune de Siguiri possède, mais également, une évaluation sur le patrimoine de la mairie. L’autre évaluation ,c’est sur le volet fiscal : la mobilisation des recettes.  Ce fût le premier travail. Le second, c’est la phase du diagnostic participatif qui  consiste à demander l’avis de chaque citoyen sur son attente de l’équipe de la délégation spéciale. Donc, à notre installation, nous avons pensé d’abord qu’il faut créer un cadre de vie et de travail moderne, bien requis. Nous avons apporté des changements au niveau du bâtiment administratif de la ville. Nous avons pensé aussi que Siguiri est une ville minière et que  l’or ne fait pas  partie des ressources renouvelables. Les dégâts environnementaux sont vastement causés. Nous avons pensé aussi à apporter notre soutien à la politique du gouvernement du colonel Mamadi Doumbouya, dans le cadre du reboisement. Nous avons pu offrir 5.000 plants dont 3.000 orangers et 2.000 manguiers à la population de Siguiri , à titre gratuit. Au-delà, nous avons pensé au recensement. Ce recensement va nous permettre de connaitre le nombre de foyers de Siguiri ,le nombre d’exploitants que compte les seize quartiers . C’est ce qui peut nous permettre d’avoir une carte non seulement de la commune urbaine mais,  ça nous permettra d’avoir une idée sur ce qui peut  être prévu comme budget au niveau des recettes . L’autre réforme, c’est la sécurité des citoyens dans la circulation. Comme vous le savez , le taux d’urbanisation est très élevé, la densité [ de la population] est très forte. Nous avons pensé que les cas d’accident deviennent de plus en plus récurrents. La solution apportée, c’est que nous avons pensé à la sécurité routière. C’est ce qui nous a poussés à acheter des feux tricolores pour permettre de donner une certaine éducation dans la circulation, donc, de normaliser la circulation afin de réduire les cas d’accidents . Ce sont ces réformes, entre autres ,que nous avons  dans notre plan d’action d’urgence, à  côté de quelques microréalisations qui doivent être réalisées, dans le plus bref delà, que nous avons trouvées dans le PAI ( Plan Annuel d’Investissement )…

Qu’avez-vous fait pour réaliser toutes ces réformes en si peu  de temps, d’autant plus que vous  héritez d’une équipe qui été accusée de détournement et de mauvaise gestion par le ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation ?

Par exemple, les feux tricolores ont été commandés pour treize grands carrefours , les plus risqués de la commune urbaine. Le coût par carrefours  c’est 68 millions de francs guinéens, donc les treize carrefours font  884 millions de francs guinéens. Avec l’entreprise, nous nous sommes entendus qu’il fallait payer les deux premiers carrefours qui avaient été installés, à l’occasion de la date anniversaire de la prise du pouvoir par le CNRD. Nous avons payé ces deux premiers carrefours et dans notre contrat,  avec l’entreprise, nous nous entendus que la mairie paie un carrefour à chaque fin de mois. Cela, pour dire que nous n’avons pas payé la totalité de ces treize carrefours ,parce que la loi ne condamne pas les collectivités de s’endetter auprès des banques ou de s’endetter auprès des entreprises. Donc, si vous voulez réaliser de très grands projets ,  vous ête-êtes tenus obligés d’aller en banque puisque nous avons cette garantie. Nous sommes un service décentralisé qui est un démembrement de l’État à la base. Donc, nous sommes en train de faire un certain redressement à la base. C’est une refondation dans le cadre de la mobilisation des recettes.

Lorsque vous parlez de la mobilisation des recettes, ceci nous amène sur le contentieux qui vous oppose aux syndicats de mototaxi, au tour du droit de perception et de gestion des taxes payées par les conducteurs.  Concrètement, qu’est-ce qui explique ce phénomène ?

Nous avons initié une rencontre  avec  tous ceux qui sont partenaires à la mairie. Nous avons envisagé d’élaborer un CDL ( convention de développement local  (…). Particulièrement avec les syndicats des transporteurs ( autos et motos ) ,nous sommes convenus que les gares routières appartiennent à la mairie . Les recettes que les transporteurs font de leurs engins n’appartiennent pas à la mairie mais, la taxe de stationnement qu’ils doivent payer ,appartiennent à la mairie. Donc, personne ne doit prendre la taxe de l’État à la place de l’État. Et c’est pas nous qui l’inventions ,c’est la loi qui le dit . Avec les transporteurs, nous avons pensé qu’il y a un très grand nombre de taxis à Siguiri aujourd’hui. Ceci doit être une opportunité aussi pour la collectivité afin de faire face aux actions prioritaires en faveur de la collectivité. Donc, nous leur avons proposé, dans notre séance de travail ,quatre points. Nous leur avons proposé qu’il faudrait désormais, au point 1 ,que l’engin soit propre et que son conducteur soit propre. Cela, pour la santé des citoyens de la ville . L’autre point,  nous avons demandé à ce que chaque conducteur porte désormais les chaussures fermées pour éviter les accidents récurrents dont ils sont coupables en longueur de journée. L’autre point est lié à l’uniforme de la tenue. Nous reconnaissons les équipes syndicales.  C’est la loi qui l’autorise. Leurs cotisations syndicales également, nous ne sommes pas contre. Nous sommes  d’accord. La mairie n’a aucun regard sur ces cotisations syndicales mais, la taxe que chacun doit également payer dans le cadre du développement de la collectivité, c’est la loi qui l’exige. Par exemple, l’article 502 du code des collectivités locales révisé stipule que  « la perception des recettes propres de la collectivité locale est effectuée par le service des recettes de la collectivité, sous le contrôle du receveur de la collectivité, conformément aux dispositions régissant les opérations de recettes des collectivités locales établies par la loi  » qui renvoie à l’article 465 qui dit que « les recettes des collectivités locales sont recouvrée par le comptable de la collectivité ou son délégué. Sont redevables, les paiements au comptant, les paiements par chèque et les virements bancaires ».

Donc, ceci dit que la taxe de la collectivité doit être recouvrée soit par le comptable, c’est-à-dire, le  receveur. Il peut déléguer quelqu’un à sa place qui va temporairement s’occuper de ce recouvrement et ,en contrepartie, il lui paie une prime ou un salaire. Mais, personne ne doit récupérer la taxe de l’État sans que ce ne décidé ou autorisé par l’État. Voilà ce qui nous met en mal aujourd’hui avec les syndicats des mototaxis. Il y a longtemps, la loi votée par le législateur est mise de côté , est mise à l’écart au profil des concessions, au profil des négociations, au profil des conventions. Donc, nous sommes, au fait, dans une certaine éducation fiscale. C’est dans cet ordre d’esprit que nous avons demandé que chaque conducteur paie désormais 2.000 francs guinéens à la collectivité de Siguiri, par jour.  2.000 franc guinéens ,je le répète, pour permettre pour permettre au conseil communal et à l’administration communale de faire face aux préoccupations de Siguiri.

Le fait de doubler la taxe journalière par tête de conducteur, n’est-ce-pas là une mesure aggravante de la crise ?

Souleymane Koita , nous pensons que la taxe n’appartient à personne. Elle n’appartient ni aux syndicats, ni aux taximètres. La taxe, elle appartient à l’État et l’État, par la mairie. Leurs cotisations syndicales , nous n’avons aucun regard. Même s’il font des cotisations de milliards , la mairie n’a aucun droit de regard sur ces cotisations syndicales mais , c’est légal que la taxe revienne à la mairie. Personne ne doit utiliser à la place de l’État. Nous sommes disposés au cadre de discussion mis en place par le préfet afin de trouver un compromis mais dans le respect des dispositions du code des collectivités révisé.

Propos recueillis par Mamadi CISSE pour Actuguinee.org

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