Ebola: l’Europe veut briser l’isolement de la Guinée
Le commissaire européen Neven Mimica (photo) s’est rendu dans le pays touché de plein fouet par Ebola. L’Europe veut aider la Guinée à combattre l’épidémie, et surtout à se reconstruire.
Dans la journée du 5 décembre 2014, dans toute la Guinée, 13 personnes ont été diagnostiquées atteintes du virus Ebola, et 5 personnes en sont mortes. Les nouveaux cas continuent d’apparaître dans le pays, et suivent encore une courbe ascendante : 217 décès en août, 280 en octobre, 299 en novembre… “Mais c’est Ebola qu’il faut isoler, pas la Guinée”, plaide l’ambassadeur de ce pays d’Afrique de l’Ouest auprès de l’Union européenne. Il a insisté pour inviter le commissaire européen au Développement Neven Mimica à venir à Conakry, ce week-end des 6 et 7 décembre, et celui-ci a répondu présent. “Qu’il vienne ici, après François Hollande, et d’autres personnalités européennes, c’est plus que symbolique. Ca brise l’isolement de la Guinée.”
Le Croate Neven Mimica est venu en particulier pour signer le programme national indicatif, soutien financier de 244 millions d’euros au développement de la Guinée, qui s’étalera sur 6 ans. Auquel s’est ajouté entre autres une nouvelle somme de 11 millions d’euros, destinée à limiter l’impact de l’épidémie d’Ebola sur le pays. “C’était le moment de réaffirmer l’engagement européen pour soutenir l’ancrage de la Guinée dans un processus démocratique, justifie Neven Mimica. Le pays vit une situation difficile et complexe, causée par l’épidémie d’Ebola et a besoin d’assistance. Notre autre but, c’est aussi d’augmenter la synergie entre la réponse d’urgence à Ebola et le développement de plus long terme. Ici, on voit aussi que Ebola n’est pas seulement un problème médical, c’est aussi une question d’impact économique, de sécurité alimentaire, politique, fiscale… Le pays doit faire face à tout cela…”
Outre le soutien à l’état de droit, et à l’assainissement et l’urbanisation, le nouveau programme européen se concentre à hauteur de 40 millions d’euros sur le système de santé, déjà en profonde difficulté avant l’épidémie. L’objectif est d’éviter d’autres épidémies futures, celle d’Ebola en particulier. “Maintenant, il faut convertir ces chiffres en réalité : en lits d’hôpitaux, en personnel médical, en fournitures pharmaceutiques, en équipements techniques…”, ajoute le commissaire européen, qui estime aussi que les états-membres de l’Union européenne devraient envoyer du personnel médical formé, apte à travailler dans cette situation d’urgence pour lutter sur le terrain contre Ebola, dans les trois pays touchés (Guinée, Libéria et Sierra Leone).
« Pas en-dessous de 3000 soignants »
Le coordinateur Ebola de l’UE et d’autres officiels essaient en ce moment de convaincre les pays de l’Union d’accepter cette démarche. “En terme de nombre de personnes, je pense qu’il ne faudrait pas descendre en-dessous de 3000 soignants”, juge Neven Mimica. Du côté des autorités guinéennes, on salue l’aide de l’Europe, qu’on qualifie “d’énormissime”. Mais le ministre de l’Economie évalue le coût du renforcement du système sanitaire à 700 millions de dollars. Des bailleurs de fonds comme la France ont déjà promis 100 millions de dollars. “L’USAID (agence des Etats-Unis pour le développement) va nous accompagner dans cette reconstruction, annonce Mohamed Diaré, le ministre de l’Economie. Il faut éviter ce qui s’est passé au début de cette épidémie : il a fallu le décès de deux, trois, quatre, six personnes pour qu’on envoie des échantillons de sang être testés à Dakar, puis à Paris, avant de savoir qu’il s’agissait d’Ebola. Si nous avons des labos, des équipements, cela ne se passera plus ainsi.”
La France a ainsi annoncé la création d’une antenne de l’Institut Pasteur en Guinée. “Il y a 3 -4 ans, les principaux bailleurs de fond s’était retiré, cela avait affaibli le système des santé, souligne le ministre. Je crois que cet impact négatif d’Ebola se transformera en un bien, qui permettra de renforcer notre système de santé”. Au niveau économique, la Guinée souffre aussi. Plusieurs pays proches (comme la Guinée-Bissau ou le Sénégal) ou lointains (la Chine…) ont réduit les visas et les échanges commerciaux, ou même carrément fermé leurs frontières. La Guinée-Bissau ne rouvrira les siennes que ce 9 décembre – celles-ci étaient fermées depuis le 12 août.
Les investisseurs étrangers sont aussi plus qu’attentistes, même si une partie du secteur minier continue à fonctionner. Le ministre Mohamed Diaré veut une reprise économique dès 2015. Mais en Guinée, les acteurs du secteur économiques sont d’accord sur un point : sans une lutte réussie contre la fièvre hémorragique à virus Ebola, et la disparition des derniers cas – dans tous les trois pays tant les liens d’affaires entre le Libéria, la Sierra Leone et la Guinée sont étroits – , il n’y aura pas de relance économique. Pour 2015, selon la Banque mondiale, la Guinée n’affichera qu’une croissance de 0, 5 %, contre des prévisions de 4,5 % avant la crise.
lalibre.be
Les commentaires sont fermés, mais trackbacks Et les pingbacks sont ouverts.