Des jeunes dégourdis, réfléchis, ça existe. Des jeunes
stipendiés et veules, ça existe aussi.
Jeunes comment pouvez-vous croire qu’ils vous faut flatter des gens vils
, sans projets dignes , éprouvés par neuf ans de pouvoir et sans bilans sérieux
, qui appellent à un rattrapage auquel
ils n’ont pas droit , qui veulent d’autres années de notre vie nationale et de
notre vie à tous pour seulement manger , boire et à passer le clair de leur
temps dans les lupanars ? Comment
pouvez-vous désespérés de ce pays ?
Comment, peut-on, à l’âge des rêves, des ambitions, de la folie des
grandeurs être avec une mauvaise estime de soi au point de croire que le
bonheur réside dans la renonciation à la liberté, à la responsabilité ?
Ô jeunesse,
jeunesse ! Je t’en supplie, songe à
la grande besogne qui t’attends : la réconciliation, le travail, la justice,
la paix, l’espoir, la liberté, etc. Cette besogne est sans fin car ceux qui
devaient l’entamée n’en ont pas eu le courage, l’intelligence : ils se
sont laissé détourner par le mesquin, le trivial ; ils ont fait des
dérobades ou cherché des compromis velléitaires, abscons et mous en lieu et place des vrais.
Ô jeunesse, tu as
des problèmes à résoudre. Ta charge est si lourde que je crains que tu puisses la coltiner. Ose-là !
A défaut, je t’en conjure, ne l’aggrave pas !
Ô jeunesse , je
t’en supplie , reprends-toi et refuse de servir de cautions à ceux qui prennent
d’autres jeunes pour des chaires à canon ,qui les massacrent et qui te refusent l’emploi, ta chance de prouver à
ton pays tes talents.
Ô Jeunesse, tu es l’ouvrière, mais on te refuse le travail.
Celui qui t’a dédié ses mandats t’abuse.
Tu dois jeter les bases de ce
pays qui se fourvoie mais on te refuse la responsabilité et veut que tu
te tiennes auprès de ceux de la vieille baderne.
Tu dois être à la recherche du temps
perdu par ce pays.
Jeunesse, jeunesse, ceux qui éperonnent l’aiguillon de la
haine, qui appellent à leur donner une chance ne t’ont fait aucune chance,
aucune faveur. Souviens-toi de la souffrance de tes aînés, de tes mères qui ont
investi temps et argent à ce que tu pourvoies quand l’âge frappera à leurs portes. Qu’y peux-tu ?
Souviens-toi que la liberté que tu veux renier, aujourd’hui menacée et face à la disparition
de laquelle tu te sens indifférente, est l’œuvre de tes aînés. Remercie-les et sois reconnaissante pour leur sens de
l’honneur et leurs engagements. Tu n’es pas
fière de leur héritage. Certes, il est exigu,
mais c’est ce dont ils t’ont départi. A défaut de laisser aux prochaines
générations un héritage bien meilleur, ne te rends pas coupable de la démolition de
celui-là que tu as hérité.
Ô jeunesse, ne
commets pas le crime d’acclamer les mensonges, de faire la campagne auprès des
faussaires et des insatiables, des drogués du pouvoir. Ils conduiront ce pays à
la désolation. Veux-tu associer ton nom à cela ? Ta postérité
pourrait être dédaigneuse.
Jeunes, les aînés, anciens, alors qu’ils étaient jeunes,
avaient nos âges quand ils ont conduit ce pays à l’indépendance. Peut-être assez de nous disent : il nous
faudra attendre et un jour, nous jouerons notre partition. Dans cet attentisme,
l’irréparable pourrait survenir. D’autres,
ont œuvré à la démocratie, ne l’ayant jamais conquise, nous avons reçu de leurs pugilats des acquis, ils sont énormes
et doivent être entretenus à des fins de
perfection. Tel est le crédo des
générations ambitieuses : faire mieux que les aînés en améliorant
ce qu’ils ont laissé et en créant ce que leurs esprits n’ont pas pu entrevoir et dont les conditions de leurs temps n’ont
pas permis l’éclosion !
Aujourd’hui, les
resquilleurs menacent de mettre à
l’eau l’œuvre des autres, n’ayant eux d’œuvre que la démolition. Ils menacent
de nous conduire à la nuit, aux ténèbres
et à l’inconnu, à l’incertitude. Plus que jamais, à mesure de leur obstination,
la certitude de cette incertitude est imposante.
Jeunes, les autres se sont assumés. Nous autres,
devons-nous attendre que le ciel pourvoie, que la communauté internationale intervienne
afin d’éviter que notre pays qui marche au bord d’une falaise escarpée n’aille
dans la béance ? Il ne doit pas
y tomber. Les dégâts seront extrêmes et leur réparation coûteuse. Le sort
de notre pays pourrait y être scellé.
Nous autres, devons-nous fuir ce pays, l’abandonner dans
les mains de ceux qui ne l’ont jamais respecté pour n’avoir jamais honoré le
moindre serment ? Devons-nous le
fuir pour revenir quand il sera devenu beau, plus respectueux des droits de
l’homme, quand il sera à même de garantir à ses citoyens le droit au travail, à
l’eau potable et à l’électricité ? Peut-être, ce jour n’arrivera pas. Peut-être,
aura tué en lui tout ce qui lui reste encore de bons, on l’aura vidé de
tout et de son âme. Et, en ce moment, devrions-nous nous résoudre à vivre chez
les autres, ailleurs ? Malheur est celui qui entrevoie son bonheur chez
les autres !
Ô jeunesse, tu veux que ce contre quoi -l’absolutisme -, tes
aînés ont payé de leur vie, revienne ?
Jeunesse, jeunesse ! Sois toujours avec la justice. Si l’idée de la
justice s’abaisse en toi, tu iras à ta perte .
Jeunesse, qui se lèvera pour défendre la norme supérieure
du pays et sa vertu thérapeutique des
crises et de stabilité politique, si n’es toi qui a besoin de tes rêves, de la vie,
de l’espoir, toi qui n’es comprise dans aucune affaire louche ? Qui
peut, dans ce pays, parler haut, fort, en toute pureté, en toute bonne foi, si ce n’es toi ? Jeunesse, pourquoi, dois-tu renoncer à
l’accomplissement de ta mission que nul n’assumera si ce n’es toi ?
Jeunesse, tu te dis : que puis-je y
faire ? Vaine est cette inquiétude.
As-tu essayé quelque chose ? Essaye, essaye et essaye. Tu verras que tu es
la force et que tu pourras. Mobilise et mobilise. Tu n’as plus à t’indigner.
Si te ne fais rien, c’est que le pays ira en ruine car :
en taillant la constitution à la mesure d’un seul citoyen, on aura instauré les
institutions de violences et aura justifié d’autres violences dont celles de
contestation et de répression. Voudrons-nous, jeunes, d’un cercle vicieux de la
violence après celui de la pauvreté ? Notre pays est plus que jamais
menacé de désintégration. Vouloir de la
paix, c’est s’opposer à l’institution de la violence première qui consiste pour un seul homme à imposer sa volonté tyrannique à un peuple
et, illégalement.
Jeunesse, voilà à présent ta besogne, la nôtre :
éviter que la Guinée se défasse,
trépasse. Ne te soumets à personne et à
aucun dieu. Ta responsabilité est pleine et entière. Revendique-la. Quand tu comprendras que tu dois tout ton bonheur à la résistance, tu comprendras
qu’aucun dieu ne pourvoira.
Ibrahima SANOH, Citoyen guinéen, Ecrivain, Président du mouvement Patriotes Pour l’Alternance et le Salut