Genève : 31ème session du Conseil des Droits de l’Homme, Allocution du Ministre de l’Unité Nationale et de la Citoyenneté
Monsieur le Président de l’assemblée générale des Nations Unies Mesdames et Messieurs, Il y a quelques mois nous étions devant cette auguste assemblée pour représenter notre pays dans le cadre de l’examen périodique universel.
Ce mécanisme global et interactif essentiel et d’une grande utilité fut l’occasion pour nous de faire un état de lieux rigoureux, responsable et complet de la problématique des Droits de l’Homme en Guinée. Cette exigence de rigueur et de responsabilité nous nous l’imposons par respect pour notre pays et son peuple, pour nos partenaires, aussi et surtout pour les victimes des violations des droits de l’homme, d’injustices et de frustrations multiples.
Cet inventaire rigoureux se justifiait et se justifie pour des raisons pragmatiques, puisque pour changer il faut avoir la conscience de l’impératif de changement, et pour soigner il faut déceler le mal.
Tous les sujets relatifs aux Droits de l’Homme furent abordés sans complaisance, avec une réelle volonté d’action et de cooperation. Car, ne l’oublions pas, de par notre histoire, cette société fragile doit construire dans un même temps, dans une même dynamique un Etat légitime, une puissance publique effective et une société respectueuse des Droits de l’Homme.
Sans cet État et cette puissance publique qui aura la charge de garantir la liberté et la sécurité de ses citoyens et de ceux qui vivent sur son territoire, de promouvoir tous les droits civils et politiques de façon égale et démocratique pour tous, de garantir le droit à la Santé, le droit à l’éducation,de protéger les plus files et les plus fragiles contre certaines violences inhérentes à la vie sociale, de garantir les droits socio-économiques et culturels, de garantir une bonne administration de la justice, en luttant contre toutes les formes d’impunité et d’injustices, le combat pour les droits de l’homme risque d’être une impasse.
Face à ces défis considérables, des efforts et des actes notables ont été fournis par notre gouvernement, et continueront à l’être. Mais disons le d’emblée la tâche est périlleuse et ce qui reste à faire est de taille et profondément vaste.
-Il nous faut aussi le courage d’interroger, de déconstruire tous les schémas culturels qui ne répondent pas aux principes universels des Droits de l’Homme auxquels notre pays a malheureusement et librement adhéré, et qu’il se doit de respecter.
Depuis 5 ans, tout en reconnaissant la difficulté et la complexité de la tâche, nous avons poser un certain nombre d’actes notables pour l’amélioration du système éducatif, du système de santé et de l’administration de la justice, quoique largement insuffisants au regard de la lourdeur du passif et des légitimes attentes des citoyens. Nous continuons à mettre en place et à renforcer les instruments indispensables pour une meilleure justice, à travers un accès équitable à la justice, nous continuons à travailler pour la mise en place d’une magistrature responsable et indépendante, nous continuons à travailler pour l’amélioration des conditions de détention, qui il faut le dire qui respectent pas les normes requises. (une prison est en construction en dehors de la capitale afin de fermer l’ancienne prison de la capitale), nous continuons à travailler pour renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes, aussi bien en terme de discrimination que de violences physiques ( agression, excisions, viol)
Sur toutes ces questions, quelques avancées sont enregistrées, mais les défis restent considérables. Malgré tous ces défis, jamais la Guinée n’a autant fait preuve de volonté coopérative avec les mécanismes internationaux de protection des Droits de l’Homme que depuis 5 ans, notamment par:
.La mise en place d’un comité inter ministériel des Droits de l’Homme . La soumission des rapports devant les organes de traités.
En janvier 2015, notre passage pour l’examen périodique universel.
La mise en place du conseil supérieur de la magistrature.
La mise en place de La Cour Constitutionnelle.
La mise en place de L’institution nationale des Droits de l’Homme Nous savons que nous devons continuer et accentuer le travail dans tous ces domaines, nous sommes déterminés à le faire, mais les réalités étant ce qu’elles sont de par l’histoire, la sociostructure, et les faiblesses de la puissance publique, nous avons aussi besoin de soutien et d’accompagnement de l’ensemble de nos partenaires pour nous aider à faire face à tous ces défis pour une véritable transformation polico-institutionnelle et sociales nous permettant de donner à l’idée d’Etat tout son sens, tout son crédit et toute sa force en vue d’une meilleure garantie des Droits de l’Homme.
Malgré toutes les difficultés et tous les défis qui restent encore immenses notamment en matière de lutte contre les violences, pour une meilleure administration de la justice et de lutte contre l’impunité.
Il ne saurait être nié qu’il y a eu des avancées, des améliorations à noter, des actes positifs qui se manifestent, des mentalités qui se réveillent et bougent positivement, des pratiques qui deviennent inacceptables aux yeux de tous.
Ces avancées positives nous les avons obtenus aussi grâce à l’accompagnement et le soutien des partenaires institutionnels,civils et associatifs.
C’est ici le lieu de remercier le Conseil des Droits de l’Homme, le haut commissariat, les partenaires bi et multilatéraux, les ONG qui nous ont accompagnés et soutenus dans ce combat et qui continuent à le faire, car la bataille continue, mais l’espoir est permis.
A l’occasion de tous ces anniversaires, celui des 50 ans des deux pactes internationaux relatifs aux Droits civils et politiques, aux droits socio-économique et culturels celui de 30 ans de la déclaration relative au droit au développement et les 10 ans du Conseil des Droits de l’Homme, il est nécessaire de porter un regard lucide sur le combat pour la promotion et la protection des droits de l’homme à travers le monde. Et ce regard doit être porté par le biais de la nature et de l’ampleur de la contribution de la communauté internationale en général et des pays qui servent de modèle dans cette bataille. Il n’est nullement question pour nous de nous absoudre, en tant que gouvernement national et peuple souverain de notre responsabilité fondamentale en la matière. Mais il est important que l’ensemble de la communauté internationale se mobilise davantage, au delà des mots, des verbes, des slogans et des discours pour donner à l’idéal des droits de l’homme tout son sens, toute sa valeur, toute son effectivité pour tous les peuples quelque soit leur singularité respectable. Les droits de l’homme sont universels , puisque l’homme est par nature un être universel au delà de ses spécificités culturelles. Aucune identité culturelle n’est en soit compatible ou incompatible avec la philosophie des Droits de l’Homme. Car aucune culture n’est pure d’apport, ni exclusive, ni absolue, ni immuable ni inamovible.
Ce sont les hommes qui font la culture et par conséquent les cultures sociales sont et demeurent ce que les hommes en font. Oui, je le dis ici devant cette auguste assemblée, en prenant l’histoire comme témoin, la communauté internationale, singulièrement les grands pays développés qui servent de modèle pour ces valeurs essentielles à l’humanité, doivent joindre les actes aux discours, et avoir des politiques qui correspondent aux enjeux des droits de l’homme à travers le monde. Elle doit agir pour faire bénéficier à tous ( je pense ici aux réfugiés, aux migrants), les avantages légaux, humains de cette philosophie des Droits de l’Homme, de ses valeurs et de ces principes. En faisant bénéficier les valeurs et règles des Droits de l’Homme à tous, y compris à ceux et celles que certains considèrent ne pas les mériter. Quel être humain n’a pas droit aux Droits de l’Homme ? Une telle exception sera un désastre moral et intellectuel pour l’ensemble de la structure philosophique des Droits de l’Homme.
Et être dans cette philosophie c’est tuer l’essence même des Droits de l’Homme. C’est aussi le lieu de rappeler qu’il est essentiel de ne pas séparer la question de la promotion et de la protection des Droits de l’Homme de la problématique de l’Etat, de son effectivité, de son sens, de son utilité et de sa légitimité vis à vis du peuple qu’il est sensé incarner, représenter, protéger, défendre et servir, démocratiquement.
* Enlever aux États , aux gouvernements démocratiques par des logiques économiques et financières injustes, dogmatiques, leur légitimité et leur crédibilité socioéconomique ( par conséquent politique ) aux yeux de leurs peuples , c’est leur placer dans, l’incapacité de défendre des valeurs qui sont fondamentales pour la démocratie , la justice et la paix que sont les Droits de l’Homme.
* Rendre les États et les Gouvernements démocratiques impuissants à cause des idéologies financières et économiques socialement désastreuses, face aux attentes et aux demandes légitimes de leurs peuples, c’est annihiler leur capacité à assumer concrètement et efficacement leur rôle et statut de débiteur principal en matière de Droits de l’Homme.
*Empêcher les États et les gouvernements démocratiques par simple dogmatisme économico financier de faire face aux souffrances de leur peuple, c’est détruire leur capacité régalienne et providentielle indispensable à toute puissance publique crédible et légitime.
* Attendre des États et des gouvernements démocratiques qu’ils promeuvent et garantissent les Droits de l’Homme, tout en leur privant de toute possibilité réelle de faire face aux attentes sociales, c’est mettre en péril ces sociétés , et par conséquent l’équilibre et la sécurité internationale. Les Droits de l’Homme sont-ils simplement des droits civils et politiques? Et les droits socioéconomique et culturels, que deviennent-ils dans des États pauvres, fragiles, impuissants, réduits au simple rôle de police? Oui les Droits de l’Homme sont universels, mais ils sont aussi indivisibles et interdépendants. A défaut ils perdent leur cohérence, leur sens et leur force politique et morale. Quel enfant obéirait à une mère ou un père inexistant, absent? Quel enfant obéirait à un père ou une mère sans utilité materielle, sans intérêt social, sans amour, sans affection? On ne saurait réduire, sans risque pour la promotion et la protection des Droits de l’Homme, le sens et l’essence de la puissance publique dans certaines parties du monde, soit par illégitimité politique, soit pour des raisons économiques, financières ou géopolitiques.
Combien de recommandations justes et pertinentes de ce Conseil à l’adresse de la communauté internationale et bien sûr des gouvernements et des Etats aussi, pour l’appui techniques, l’accompagnement et le soutien sont restées sans suite concrètes? La menace pour les Droits de l’Homme, son idéal, sa perspective, son horizon, sera inéluctablement une menace pour l’humanité tout entière. Soyons en convaincus! Agissons ensemble pour éviter de nous faire piéger par deux impuissance, celle des États, des gouvernements et celle de la communauté internationale.
Agissons ensemble et vite pour ne pas laisser place au désenchantement politique, démocratique et moral dans certaines de nos sociétés. Agissons ensemble et vite pour montrer à nos peuples respectifs qu’au delà de sa dimension morale, les Droits de l’Homme sont une véritable politique pragmatique capable de garantir aux peuples, aux sociétés et à l’individu un environnement de paix, de libertés, de justice , de sécurité et d’épanouissement riche et prospère. Ne serait-ce que dans sa capacité à résister aux pressions socioculturelles nuisibles. Ne serait-ce que dans sa capacité à édicter des normes légitimes, crédibles et à les faire respecter efficacement aux bénéfices de chacun et de la société dans son ensemble. Ne serait-ce enfin que dans sa capacité à donner au peuple la conscience de l’existence d’un lieu.
Ne serait-ce que dans sa capacité à édicter des normes légitimes, crédibles et à les faire respecter efficacement aux bénéfices de chacun et de la société dans son ensemble. Ne serait-ce enfin que dans sa capacité à donner au peuple la conscience de l’existence d’un lieu de recours en cas de besoin et de secours en cas de nécessité. On ne gouverne pas un peuple avec la mathématique et la statistique économique et financière! On ne saurait remplacer les Etats par les entreprises, dans la perspective de la garantie du droit au développement. Pour toutes ces raisons, au nom du peuple de Guinée et du Gouvernement, nous lançons un appel à la mobilisation pour aider à la mise en place ou à la consolidation d’une véritable politique internationale en matière de promotion et de protection des Droits de l’Homme à travers le monde, surtout dans des sociétés aux structures institutionnelles fragiles. Cette mobilisation ne doit écarter aucun des aspects ou des paramètres de la problématique des Droits de l’Homme, et cela va du respect des principes démocratiques, aux renforcements des politiques de justice, de paix et de liberté dans les États et entre les 13 États, dans les peuples et entre les peuples, dans les cultures et entre les cultures. Notre gouvernement reste engagé et déterminé à continuer à œuvrer et agir, aussi bien sur le plan politique, institutionnel, social, culturel qu’économique pour un meilleur ancrage de la culture et des habitudes des Droits de l’Homme dans notre pays. Cela se passe aussi par la consolidation de notre tissu social, de l’unité nationale, et nous réconciliant avec notre histoire. Cela se passe aussi par le renforcement de l’Etat de droit, de la culture citoyenne pour favoriser l’émergence d’un meilleur environnement démocratique.
Notre pays sort d’une grave crise sanitaire aux conséquences humaines, sociales et économiques dramatiques. Cela nous a appris une nouvelle fois si besoin en était, qu’il nous faut un système sanitaire performant, pour mieux garantir le droit à la santé, à la vie. C’est le lieu de remercier au nom du peuple de Guinée et du Gouvernement tous ceux qui nous ont apportés leurs appuis et leurs soutiens. Je le dis ici, le peuple de Guinée, uni, composé de citoyens libres et égaux gagnera cette bataille des Droits de l’Homme, parce que nous croyons aux vertus de la justice, de la liberté et de la paix. C’est notre combat C’est notre horizon
Le Ministre de l’Unité Nationale et de la Citoyenneté République de Guinée Monsieur Khalifa Gassama Diaby
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