Détournement de fonds alloués aux pistes rurales dans le Bagataye : Trois sociétés pointées du doigt
Fodé Mano Bangoura, porte-parole des populations des villages situés dans l’alentour de Monchon dénonce le comportement de trois sociétés qui auraient perçu des fonds pour la construction des pistes rurales, sans pour autant effectuer les travaux. Dans cette interview qu’il a accordée à notre reporter, Fodé Mano Bangoura qui parle au nom des populations Bagas de cette zone, dit que le gouvernement a été informé de cette supercherie.
Récemment une équipe gouvernementale est venue sillonner dans le pays Baga, quel était l’objectif de cette visite?
Fodé Mano Bangoura : C’est suite à des dénonciations faites par des citoyens du pays Baga, afin que le gouvernement sache qu’il a dépensé des montants lourds pour la réhabilitation de leur route, mais que le travail n’a pas été fait comme il se devait. Ainsi, la population baga s’est mise à dénoncer cela afin de se faire entendre de l’opinion nationale sur ces faits. A cet effet, le mois de mai passé, le ministre est arrivé pour constater les faits et les besoins de cette population baga. Effectivement, le ministre lui-même a constaté que la route qui était financée par l’Etat, je peux dire l’un des premiers projets du président de la République Alpha Condé n’a pas atteint son but. C’est à dire réhabiliter complètement cette piste rurale longue de 15 km environ.
Pouvez-vous nous dire qu’est-ce qui a été défini dans les différents cahiers de charges?
Il était dit de faire le pont de Kiffinda, mais aussi celui de Monchon. De faire un remblai de la route nationale jusqu’à Yamponi. Mais qu’est-ce que nous avons constaté, les gens ont fait pratiquement le pont de Kiffinda et abandonné celui de Monchon, et le remblai n’a pas été fait, alors que l’argent a été payé plus à 70%.
Quelles sont ces différentes sociétés contractantes ?
Vous avez EMHC-BTP qui avait fait le pont de Manbossa pour une valeur de 1 450 783 000 gnf. Vous avez ECODAF qui avait le pont de Kiffinda avec une bagatelle de 626 104 830 gnf, EGCL qui avait eu le marché de remblayage de la nationale jusqu’à Yamponi pour un montant de 801 759 500 gnf. Il faut dire que EGCL était payé à 100%, ECODAF 100%, EMHC-BTP était payé à 50%. Toutes ces trois entreprises aucune d’elle n’a respecté son cahier de charge.
A votre connaissance est-ce que les responsables de ces entreprises ont été inquiétés pour ces manquements?
Non, ces entreprises n’ont pas été inquiétées. Et du côté des différentes autorités, aussi bien du sous-préfet de Tougnifili que du gouverneur de la région de Boké, aucun d’eux n’a réagit face à cette situation. Mais également la direction nationale des pistes rurales est restée muette. Ce qui fait que les responsables de ces entreprises vaquent librement à leurs affaires. Ils ne sont pas inquiétés. L’argent du contribuable guinéen est parti par la petite fenêtre, et cela est dommage.
Rappelez-nous, en tout combien l’Etat a déboursé pour ce projet ?
L’Etat a dégagé 2 878 647 330 gnf.
Si l’on parvenait à désenclaver cette localité, quels en seraient les avantages pour les populations locales?
Quand l’Etat parvient à réhabiliter cette route, cela va faciliter l’écoulement des produits agricoles du pays baga. C’est-à-dire le riz le sel, l’huile, les produits halieutiques, pour ne citer que ceux-ci. Pour la société, cela permettra les citoyens de cette localité en cas d’urgence de vite transporter leurs patients vers les structures appropriées. Il faut dire aussi que cela permettra de renforcer l’autosuffisance alimentaire qui est aujourd’hui le cheval de bataille du gouvernement guinéen. Monsieur, laissez-moi vous dire que nous sommes aussi les gardiens des plaines, il y a au moins plus de 5 mille hectares ici. Cela n’existe nulle part en Guinée, seulement en pays baga. Vous avez entendu parler je crois bien des plaines du pays baga notamment de Monchon, de Bigori, j’en passe. Si l’Etat réhabilitait cette route, ça sera un coup de pouce pour la lutte contre la faim en Guinée voire même dans la sous-région.
Dans ce sens quel est le message que vous allez passer pour que les autorités entendent les doléances du pays baga ?
Merci pour l’opportunité que vous m’offrez, je prierai le président de la République de s’intéresser à ce dossier afin que pendant la saison pluvieuse, que nos sœurs et nos mamans cessent de nager pour venir se faire consulter au chef-lieu sous-préfectoral.
Autre chose, bon nombre d’observateurs estiment que le paysage de la nationale Conakry-Boffa serait aussi à la merci des feux de brousse et du déboisement. Est-ce vrai ?
Oui c’est clair, l’Etat doit retrousser les manches sinon à l’allure où vont les choses, le pire n’est peut être évité. Rien qu’en restant au bord de la route vous constaterez comment les citoyens sont en train de décimer la brousse en mettant le feu, en coupant les bois à cause de l’argent. Par exemple au niveau du village de Kangoliya, vous verrez comment le feu a ravagé la montagne. Pourtant ce relief est très utile pour nous les êtres vivants. Mais je me demande qu’est-ce que les brigades forestières font pourtant elles sont payées et elles sont dans les villages. Je demande à l’Etat de redynamiser ses services.
Entretien réalisé par Richard TAMONE (Le Démocrate)