Alpha Condé, procès des pro-Gbagbo, Ouattara, élections en Guinée: Sidya Touré dit ses vérités!

 

Sidya Touré, ancien Directeur de Cabinet du Président Ivoirien Alassane Ouattara a accordé une interview au quotidien Ivoirien l’Inter, bien avant la Convention du RHDP...
L’inter : – Quelle lecture faites-vous de la situation sociopolitique guinéenne ?
Sidya Touré : Je peux dire qu’assurément c’est une situation catastrophique. Depuis l’avènement du régime d’Apha Condé en Guinée, il y bientôt 5 ans, ce pays est en recul dans tous les domaines. Tant sur le plan social, sur le plan économique que sur le plan politique.
-Sur le plan social, toutes les structures syndicales ainsi que celles de la société civile ont été simplement caporalisées , quelque fois à coup d’argent. Concomitamment, le pouvoir a communautarisé le débat national dans toutes ces composantes.
La violence d’Etat a entrainé des pertes en vie humaine chaque fois que les velléités de contestations sont apparues.
– Sur le plan économique, on constate que la Guinée a un taux de croissance de 2% en (2013 ) inferieur à celui constaté à la fin du régime de régime Lansana Conté.
Malgré le point d’achèvement de l’iPPTE (initiative des Pays Pauvres très Endettés) en 2011, notre pays n’a pas pu tirer profit de la soutenabilité de la dette qui découlait de cette initiative. Ceci nous aurait permis, avec une certaine diversification de notre économie, d’augmenter notre capacité à produire de la richesse.
Le constat est que après cinq ans de régime d’Alpha Condé, il n’y pas d’électricité dans les ménages, il n’y a p pas d’infrastructures de base, il n’y a même pas assainissement, même le ramassage des ordures. L’emploi a reculé de manière drastique et toutes les sociétés installées au début de ce mandat ont plié bagages.
-Quant à la sphère politique, comme vous le savez depuis 5 ans, le débat en Guinée ne porte que sur le processus électoral. L’opposition a dû batailler de 2011 jusqu’au 2013 pour obtenir la mise place d’une Assemblée Nationale. Aujourd’hui, ce même débat se focalise autour des élections communales qui n’ont pas été organisées depuis 2005.
C’est pour toutes ces raisons que je considère que notre pays est en déclin depuis cinq ans.
Quelles sont, selon vous, les raisons de la crise actuelle Gouvernement-opposition ?
C’est la conséquence d’une culture et d’une idéologie passéiste qui est celle d’Alpha Condé, qui consiste à croire que le débat politique doit envahir toutes les sphères de l’Etat et du pays de façon permanente. Le refus d’organiser les élections à bonne date alors que les accords ont été signés dans ce sens, relève simplement de la volonté de continuer à maintenir des délégations spéciales (prolongement de l’administration), alors que les mandats des maires sont échus depuis plus de cinq ans. Il se trouve que dans la loi guinéenne, ces délégations spéciales mises à la place des conseils communaux, n’ont une durée juridique que de six mois. Le refus de les renouveler alors que la CENI était prête à organiser les élections communales relève de la volonté du gouvernement d’utiliser ces délégations spéciales à leur profit.
Avant les élections de 2010, vous avez affirmé que le vrai problème de la Guinée est politique, à savoir l’inexistence d’un véritable État de Droit, sans lequel, il ne saurait y avoir ni activité économique viable, ni sécurité pour les Personnes et les Biens, et qu’il faut doter rapidement le pays, d’une Direction Politique légitime et légale. Alpha Condé est-il le problème de la Guinée ?
Cette affirmation me semble conforme à la réalité. Avant l’élection présidentielle, Alpha Condé a fait toutes sortes de promesse mais en fait n’a pas été capable de mettre en place une administration performante pour tirer profit de ces cinq années de mandat. Les reformes essentielles n’ont pas été entreprises, le cadre de l’investissement juridique et sécuritaire n’a été amélioré. La corruption a gravement affectée la gestion de la chose publique : résultat toutes les sociétés minières portant de grands projets pour le pays ont plié bagages.
Opposant historique, le président Condé est accusé d’encourager les discriminations entre les groupes, d’accentuer les inégalités qui provoquent l’explosion de violences. Etes-vous de cet avis ?
Alpha condé a été élu en 2010 dans des conditions extrêmement troubles. N’oubliez pas que malgré tous les arrangements notamment au niveau de la cour suprême, il n’a été crédité que de 18%. Et ce après avoir les annulés les résultats de certaine circonscriptions dans lesquelles j’avais gagné.
Donc, c’est un parti qui, en réalité, est minoritaire en Guinée.
La seule possibilité dans la mesure où le RPG d’Alpha Condé n’a pas de programme viable a été de faire correspondre les lignes de démarcation politique avec les lignes de démarcation communautaire.
Ceci est resté la politique essentielle d’Alpha Condé.
Les élections de 2010 ont révélé un vote ethnique mettant face à face deux blocs communautaires: les peuls avec Cellou Dallein Diallo, les malinké, Sousou et autres avec Alpha Condé. Que pèsent Sidya Touré et l’UFR (Union des Forces Républicaines) entre ces deux blocs pour espérer gagner les élections présidentielles ?
Je crois que la question est un peu male posée. Ces affirmations relèvent de la pure propagande. Parce qu’aux élections présidentielles de 2010, au premier tour, j’ai gagné dans toute la Basse Guinée ( pays Soussou ndlr) y compris les trois communes sur Cinq de la capitale. Ce qui a été d’ailleurs confirmé aux élections législatives. Il est certain qu’entre les deux grands groupes (Malinké et Peulh), il y a quelques frictions, mais ce qui est moins certain, c’est de croire que tous ces groupes sont totalement homogènes. Les élections de 2010 n’ont pas prouvé cela.
J’ai été normalement élu au premier tour de l’élection présidentielle de 2010, mais on n’en a décidé autrement. Si c’est sur la base unique de l’ethnie qu’on devrait faire de tel calcul, l’UFR n’aurait pas pesé le poids qu’elle représente aujourd’hui à savoir l’un des trois principaux partis politiques du pays.
Nous sommes convaincus qu’après les cinq années du régime Alpha Condé de part la transversalité de notre discours et la crédibilité de notre programme, nous somme à même aujourd’hui de renverser cette tendance, c’est notre objectif pour 2015.
Vous avez passé l’essentiel de votre carrière professionnelle en Côte d’Ivoire. N’est-ce pas là un handicap ?
Non, parce que les guinéens ont énormément d’admirations pour l’œuvre qui été accomplis par le Président Houphouët Boigny dans son pays. Un travail qui a permis à la Côte d’ivoire d’atteindre le niveau de vie qu’il a aujourd’hui. Le fait de savoir que j’ai, même de manière modeste, participé à l’élaboration et à la réalisation d’un tel programme est plus qu’un avantage pour moi, dans le cadre des attentes de nos compatriotes aujourd’hui.
Peut-on parier sur un rassemblement de l’opposition contre Alpha Condé ?
Ceci est un vrai problème. Parce que la Guinée a effectivement ces propres réalités. Il y a aujourd’hui, un objectif majeur, après l’échec de son mandat qui entrainé le pays à la récession, nous n’avons strictement rien n’à attendre de cette gouvernance. Nous avons aujourd’hui, les résultats les plus médiocres de la sous régions contrairement au Liberia et à la sierra Leone qui, malgré dix années de guerre civile qui ont vu toutes leurs infrastructures détruites, ce comporte mieux que nous notamment sur le plan de la lutte contre le virus Ebola.
Nous estimons que le départ d’Alpha Condé, c’est à dire alternance en 2015, est à mon sens l’objectif le plus important que les Guinéens doivent rechercher. Aucune Ambition personnelle, aucune volonté communautaire ne devrait faire en sorte qu’on dévie cette possibilité. Alpha n’a plus rien n’à nous proposer. Aucun guinéen ne devrait mettre en parenthèse l’objectif majeur consiste à son départ. C’est l’unité de l’opposition sur quelque forme que ce soit mais pouvant aboutir à cette alternance me semble être la solution aujourd’hui. Je crois que tout le monde devra s’inscrire dans cet objectif.
Pour vous, cela fait plus de cinquante ans que la Guinée souffre de ses maux sans qu’aucun remède n’ait été trouvé. Pour vous qui avez travaillé au sommet de l’administration et dans le privé en Côte d’ivoire, Premier ministre en Guinée, chef de parti politique, quel est votre remède pour sauver la Guinée ?
Notre pays est un pays post communiste, non pas poste coloniale, fort des stigmates de la centralisation du pouvoir d’où d’ailleurs la volonté que nous ressentons avec le gouvernement d’Alpha Condé de refuser d’avoir des élections à la base. L’exécutif a pris le pas sur toutes les autres institutions. La formation des élites notamment au niveau de l’administration n’a pas suivi depuis l’indépendance. Beaucoup de guinéens qui avaient la capacité de faire peut être mieux ont quitté ce pays, parce que les conditions de vie ou de sécurité n’étaient pas assurés. C’est un problème fondamental pour la Guinée. C’est pourquoi, dans le programme que l’UFR a décliné et va continuer de proposer pour ces futures élections, le point principal, de notre programme, c’est le renouveau de l’Etat. Remettre en place une administration suffisamment performante qui serait à même capable de gérer sainement l’Etat. C’est ce que j’ai fait ici en 1996 en arrivant premier ministre. Il faut rebâtir une administration efficace. Il faut une gestion efficaces des fiances publiques assainies. Il faut que cette administration ait la capacité d’entreprendre des reformes profondes qui permettraient à l’investissement privé d’avoir un environnement et sécuritaire et juridique pour permettre sont épanouissement. Et donc créer des emplois. Les solutions existent, elles sont contenues dans le programme de l’Union des forces Républicaines.
Je ne voudrais pas refermer ce chapitre sans dire deux mots sur le débat qui est permanent en Guinée: les Mines ou l’Agriculture.
Nous avons un potentiel minier extraordinaire malheureusement nous n’avons pas pu en profiter pour des raisons que je viens d’évoquer : pas de formation, pas d’énergie, et pas d’infrastructure. Nous sommes donc des vendeurs nets actuellement de bauxite non transformé. La seule unité de transformation dont nous disposions depuis 1959 a été fermée sous le régime d’Alpha Condé.
L’agriculture par contre qui concerne 70% de nos populations en Guinée est un atout extra ordinaire, les possibilités de faire en sorte que le secteur puisse nous aider à combattre la malnutrition et même à promouvoir une agriculture d’exportation sont énormes. Il suffit d’appliquer les politiques qui ont été performantes en Cote d’ivoire au Burkina et au Mali. Malheureusement ce gouvernement n’a pas été capable de faire des propositions dans ce sens et j’estime de l’UFR représente une opportunité dans ce domaine qui nous permettra de combattre rapidement la pauvreté dans notre pays.
On vous savait très proche d’Alassane Ouattara. Quelles sont vos relations actuellement ?
J’ai été un collaborateur du Président Ouattara, je dois avouer que j’en ai tiré beaucoup d’expérience et de satisfaction. Donc, nos relations sont bonnes à tous les niveaux. Mais ce sont des relations fraternelles, des relations amicales. Je me réjouis de voir aujourd’hui le travail immense qui a été commencé en 2011 en Cote d’ivoire et qui donne un nouveau visage à ce pays et qui donne un nouvel espoir pour un futur meilleur. Avec cette croissance soutenue de la volonté de tendre la main à tout un chacun, 2020 est effectivement un objectif d’émergence raisonnable pour ce pays frère.
En dépit des grands chantiers de développement engagés par le président Ouattara, la Côte d’Ivoire reste marquée par les stigmates de la crise militaro-politique qui a connu grave tournant en 2011. Pour vous qui connaissez bien notre pays, quelle solution pour rapprocher les Ivoiriens ?
Je crois en la Cote d’Ivoire parce et j’y vais très souvent. C’est un pays qui est au travail. Les ivoiriens comprennent aujourd’hui que leur pays est entrain de gagner la bataille du développement, et que ce développement est entrain d’être partagé dans toutes les régions. De nouveaux investissements se font dans tous les départements du pays, ceci absolument n’ayant aucun rapport avec l’opinion politique de ces dites régions. Il ya donc une volonté d’aller vers l’autre.
La deuxième chose, je crois que l’appel de Daoukro, qui a été lancé par le président Bédié, me semble être fondateur d’une nouvelle vision du pays. Rechercher une stabilité politique sociale qui dégage l’horizon pour les années à venir, est un atout majeur pour l’évolution du pays.
Quant à la crise post électorale les procès ont commencé en Côte d’ivoire et que le Président refuse dorénavant de transférer ceux qui sont inculpés à la CPI. On appelle au pardon tous les jours. Vous savez, il est difficile de régler ces questions en trois ans. La volonté, la détermination du gouvernement, les engagement pris, la manière dont cela s’exécute au quotidien, tel que nous le suivons, me donne l’assurance que nous allons de plus en plus vers un pays apaisé ou les revenus du travail qui sont perceptibles feront en sorte qu’il y fasse bon vivre. Je crois que cela contribuera assurément à la réconciliation que nous appelons de tous nos vœux.

Source : l’Inter (Côte d’Ivoire)

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