Session budgétaire à l’Assemblée nationale : Discours du Président Koy Kondiano
Honorables Députés, Chers Collègues,
Excellence Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
Excellence Monsieur le Ministre Conseiller Spécial Chargé des Relations avec les Institutions Républicaines,
Mesdames et Messieurs les Représentants des Institutions Républicaines,
Monsieur le Haut Représentant du Président de la République,
Mesdames et Messieurs les Membres du Gouvernement,
Mesdames et Messieurs les Membres du Corps Diplomatique et Consulaire,
Monsieur le Gouverneur de la Banque Centrale,
Monsieur le Gouverneur de la Ville de Conakry,
Mesdames et Messieurs les Représentants des Institutions Internationales,
Monsieur le Chef d’Etat Major Général des Armées,
Monsieur le Haut Commandant de la Gendarmerie Nationale, Directeur de la Justice Militaire,
Messieurs les Chefs d’Etat Major particuliers,
Madame la Présidente du Parlement des Enfants,
Révérends Représentants des Confessions Religieuses,
Distingués Invités,
Mesdames, Messieurs,
Encore une fois, le rituel constitutionnel m’offre l’occasion solennelle ce jour 05 octobre 2016 qui consacre l’ouverture de la session budgétaire, de vous souhaiter la bienvenue dans cette maison du Peuple.
Mes hommages s’adressent particulièrement aux Représentants des Institutions Républicaines et à nos distingués invités qui, malgré leur agenda contraignant, ont accepté d’honorer de leur présence la présente cérémonie. C’est avec beaucoup de plaisir que je les accueille dans cet hémicycle.
L’examen et l’adoption de la loi de Finances Initiale est un exercice intense de la vie de notre Institution au cours duquel les débats sont houleux. C’est un moment crucial de la vie de la nation où l’exécutif et le législatif engagent solidairement leurs responsabilités sur la politique budgétaire et monétaire à mettre en œuvre au cours de l’année à venir pour répondre aux aspirations de la population guinéenne.
Les attentes de nos concitoyens sont très fortes et leurs exigences sont à la hauteur des mutations de tous ordres.
Je ne doute pas un seul instant que, ayant une bonne connaissance des préoccupations sociales et économiques de nos compatriotes du pays profond, l’examen du budget qui nous sera soumis se fera avec beaucoup de rigueur, de conviction et de réalisme afin de doter l’Etat d’un bon budget.
Je souhaite ardemment qu’il soit le fruit d’échanges constructifs, de propositions concrètes et réalistes, de choix clairs et courageux, compatibles avec les objectifs de croissance et d’emploi que s’est assignés le pays.
Honorables Députés, chers collègues,
Distingués Invités,
C’est avec une réelle satisfaction que nous constatons le climat d’apaisement auquel nous assistons actuellement dans la vie politique de notre nation.
La récente rencontre de Monsieur le Président de la République avec le Chef de file de l’opposition, amplifiée globalement par celles des responsables de la majorité et de l’opposition qui s’inscrivent dans la même dynamique, fera sans doute germer les graines fécondes de l’unité et de la cohésion nationale.
Je souhaite que cette disposition de sérénité et de décrispation soit durable et inspire les acteurs politiques de tous bords dans la recherche du meilleur pour notre pays.
Mon discours d’ouverture de la session des lois 2015 confirme au besoin ce souci. En effet, dans ce discours, « j’invitais les acteurs politiques à se retrouver autour d’une table pour dialoguer, car le dialogue est un passage obligé si on tient à la paix ainsi qu’au développement et à la croissance durable de l’économie du pays.» fin de citation.
La Guinée ne gagne rien dans des querelles de politique politicienne antagoniques et ethnocentriques. Elle a vocation à ouvrir un débat pluriel, inclusif et un dialogue franc entre les composantes politiques, institutionnelles et la société civile pour diagnostiquer nos nombreux problèmes communs qui nous assaillent, et pour identifier avec pertinence et clairvoyance le meilleur schéma du vivre ensemble sans renoncer à nos convictions politiques.
Honorables Députés,
Distingués Invités,
Au titre du fonctionnement de l’Assemblée Nationale, le Bureau et l’Administration Parlementaire ont effectué au cours de l’intersession diverses activités.
L’une des plus importantes de ces activités est l’audience accordée le 02 août 2016 par le Bureau de l’Assemblée Nationale suite à sa requête, à Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement accompagné respectivement du Ministre du Plan et de la Coopération Internationale, du Ministre de l’Economie et des Finances, du Ministre du Budget et des hauts fonctionnaires de leurs départements respectifs.
Cette audience à eu le mérite d’aborder avec le Chef du Gouvernement et les Ministres qui l’accompagnaient plusieurs questions d’ordre économique dont, entre autres :
- La dette intérieure
L’accumulation des arriérés de payement de la dette intérieure et ses effets pervers sur les activités des PME et PMI impacte négativement l’économie nationale. Les discussions ont conduit à recommander la finalisation et la publication du rapport d’audit sur la dette intérieure pour que l’échéancier de remboursement qui sera défini dans le court terme produise l’effet de levier attendu pour relancer la croissance de l’économie.
- Les décaissements sur financements extérieurs
Le Bureau de l’Assemblée Nationale a, après lecture du dossier, diagnostiqué une faible capacité de décaissement des prêts et dons dont bénéficie notre pays. De 2010 à 2015, seulement 45,66% des allocations budgétaires à ce titre ont été décaissées en raison des difficultés rencontrées dans la mise en œuvre et le suivi de l’exécution des projets, ainsi que la méconnaissance des procédures des bailleurs de fonds.
Il serait bien indiqué en conséquence d’approfondir la réflexion pour identifier les causes de cette faible capacité de décaissement afin de résoudre ce lancinant problème au moment où notre pays a un grand besoin de financements extérieurs.
- Les retards dans la transmission des Lois de Règlement et de la Loi de Finances Rectificative 2016
En plus des budgets exécutés au cours de la transition, l’Assemblée Nationale attend toujours les projets de Lois de Règlement pour les exercices 2013, 2014 et 2015.
Des réunions de concertation entre la commission des Finances et la Cour des Comptes ont recommandé la mise en œuvre des modalités pratiques pour corriger cette malheureuse situation. Il a été expressément demandé au Ministère de l’Economie et des finances, à travers la direction du trésor, d’accélérer le bouclage des comptes de gestion afin que la Cour des Comptes puisse les certifier en toute connaissance de cause pour permettre au Parlement d’en délibérer de plein droit.
Pour ce qui concerne la Loi des Finances Rectificative 2016, force est de constater que malgré les injonctions réitérées de l’Assemblée Nationale, l’exécutif n’a pas respecté le délai d’examen à lui imposé par les dispositions de la Loi Organique sur les Finances publiques.
En effet, la LFR permet de corriger les prévisions initiales et de procéder aux ajustements nécessaires à l’équilibre budgétaire en agrégeant bien entendu tous les effets des évolutions conjoncturelles. Il était donc souhaitable pour les Honorables Députés de donner leurs quitus à la LFR avant la date d’ouverture de la présente session budgétaire. Encore une fois, nous sommes dans une situation de fait accompli qu’il faut assumer sous réserve de raison justifiée.
D’autres sujets aussi importants ont été discutés en rapport avec les lois programmes, la situation financière de nos ambassades, les subventions et transferts accordés aux universités publiques et privées ainsi que le cadre macroéconomique et le débat d’orientation budgétaire.
S’agissant particulièrement du débat d’orientation budgétaire visé à l’article 15 de la loi organique sur les finances publiques, l’Assemblée Nationale a insisté sur son rôle contraignant et pédagogique. En tant qu’instrument de démocratie participative, il associe la représentation nationale à l’examen technique des avants projets de budget et ouvre les discussions sur les priorités de l’Etat par rapport aux ressources financières disponibles.
Ainsi, la commission des finances qui a piloté les discussions techniques entre le Parlement et les cadres des départements ministériels concernés, en vertu du rôle qui lui est conféré par l’article 77 de la loi de finances organique sur les finances publiques, fera un compte rendu détaillé de l’ensemble de ces questions à l’attention des honorables Députés lors de nos prochaines plénières.
Honorables Députés,
Distingués Invités,
Au cours de l’intersession, le Bureau de l’Assemblée Nationale élargi à la Commission des finances a également reçu le 6 septembre la mission conjointe FMI Banque Mondiale au terme de sa mission d’évaluation du programme économique de la Guinée dont les résultats permettront de conclure définitivement la huitième revue à fin octobre.
Cette dernière mission des institutions de BRETTON WOODS est particulièrement importante pour notre pays car, si ses conclusions sont approuvées par le Conseil d’Administration du FMI, la Guinée conduira à terme, pour la première fois de son histoire, un programme formel avec le FMI.
Les développements faits par le chef de la mission au cours de l’audience augure de bonnes perspectives ; selon lui, la guinée a satisfait à tous les critères de performance : les perspectives de croissance seront de l’ordre de 5,2%, à fin 2016, contre un taux de croissance initiale de 4,7% en termes réels ; le consensus s’est dégagé sur une croissance de 4,6% projetée en 2017 et un taux d’inflation revu à la baisse de 9% à 8% en glissement annuel en 2017 ; ces variables ont été déterminantes dans l’élaborations du projet de budget pour 2017. C’est un sentiment de soulagement quand on a encore à l’esprit l’effet dévastateur de la fièvre hémorragique à virus EBOLA qui a pratiquement annihilé tous nos efforts de croissance.
L’assurance a été donnée aux membres de la représentation nationale présents à cette audience que les performances globales dans l’ensemble sont favorables à la conclusion de la huitième revue. Toutefois, cela ne signifie pas que le pays va cesser de s’ajuster et de se passer du FMI. En vérité l’ajustement étant un processus permanent, celui-ci s’impose à tous les pays ; c’est pour cela que chacun de nos pays membres du FMI est contraint de se soumettre à son contrôle périodique au moyen des consultations au titre de l’Article IV des statuts qu’il a dûment signés. C’est donc dire qu’avec ou sans le FMI, la Guinée doit, à l’instar des autres pays, continuer à s’ajuster.
Honorables Députés,
Distingués Invités,
C’est le lieu de rendre un hommage appuyé à l’action déterminante du Pr Alpha CONDE qui, depuis 2010, dans un environnement géopolitique et économique fortement perturbé et avec l’immense sacrifice consenti par le Peuple de Guinée,, a permis le retour à la stabilité politique, la reprise des relations avec les bailleurs de fonds et la mise en œuvre satisfaisante d’une politique économique et financière. Il s’agit maintenant de concevoir et de mettre en œuvre une nouvelle politique pouvant permettre la relance.
Le Gouvernement, en plus des acquis innombrables et significatifs capitalisés dans la conduite d’une politique audacieuse, franchira, nous le souhaitons, cette autre étape décisive.
Cependant, cela va contraindre les acteurs de la vie politique, économique et sociale du pays à se soumettre à plusieurs exigences :
- exigence de rupture avec les vieilles habitudes, la démagogie, la médiocrité et les calculs de politique politicienne sans issue que couvent nos comportements égocentriques ;
- exigence d’action courageuse pour mettre sur orbite une croissance durable par l’encouragement de la créativité et de l’initiative privée ;
- exigence de bonne gouvernance et de démocratie qui garantissent les droits de chacun et l’inclusion sociale ;
- exigence de transformation structurelle et sectorielle profonde pour consolider les moteurs d’une croissance globale et partagée, par la création de plus de richesse et de plus d’emplois ; en un mot, le mieux être pour tous.
Pour marquer sa volonté réelle de s’impliquer dans la réussite de ce programme de relance, l’Assemblée Nationale, forte de sa prérogative constitutionnelle de contrôle du Gouvernement, mettra en place, en référence aux dispositions de la loi organique sur les finances publiques, une commission technique qui servira de cadre de concertation périodique pour un meilleur suivi de l’action Gouvernementale.
Honorables Députés,
Distingués Invités,
Les défis à relever sont énormes ; ils s’expriment, entre autres, dans l’emploi des jeunes, la réhabilitation de nos infrastructures fortement dégradées et l’amélioration des conditions de vie des ménages.
Il nous faut agir tous ensemble chacun dans son domaine en prenant en main notre destin commun face à l’accès difficile du marché des capitaux et à la tendance baissière des prix de nos matières premières. Il nous faut nous approprier la mystique du travail créateur pour valoriser aussi bien le génie qui sommeille en nous que nos immenses ressources naturelles.
Tous les axes sont prioritaires : les projets structurants dans les secteurs porteurs de croissance, la formation scolaire, universitaire et professionnelle, la santé de nos populations, le climat politique et le climat de civisme, le respect de nos lois, la modernisation de notre administration etc…
En ce qui concerne spécifiquement le secteur de l’administration, j’appelle les hauts responsables à faire confiance à l’expérience éprouvée de leurs collaborateurs pour le meilleur fonctionnement de celui-ci, ce qui les oblige à travailler en équipe avec eux pour plus d’efficacité dans l’action.
Pour ce faire, certains principes directeurs doivent guider les actions de tout le monde :
- privilégier la stabilité, à leurs postes, des agents expérimentés, compétents et incontournables, mais qui sont souvent victimes de règlement de compte de la part de leurs chefs qui préfèrent s’en séparer, quitte à les remplacer par des agents moins performants ;
- la redéfinition des objectifs de développement afin que leur lisibilité fasse l’objet d’une option partagée par toutes les franges sociales ;
- la préservation de la visibilité optimale des procédures et mécanismes d’affectation des ressources budgétaires dans un cadre de dépense clairement défini et dont les effets sont mesurables ;
- l’efficacité dans la mise en œuvre de nos politiques publiques et la transparence dans la gouvernance.
Honorables Députés, chers collègues,
En notre qualité de dépositaires du mandat à nous confié par le Peuple souverain, nous devons être initiateurs et promoteurs de choix judicieux qui tournent le dos à la paresse, la facilité et le désespoir. Nous devons être à l’avant-garde d’actions salvatrices, cohérentes et constantes qui feront le bonheur de notre nation au moment où notre pays franchit le Rubicon d’une phase décisive de son histoire.
Nous sommes à la veille des élections de proximité. Le cadre du dialogue qui réunit actuellement les acteurs politiques et la CENI en fixera les grandes lignes.
Cette concertation souhaitée par tous doit être menée à bien, afin que les décisions qui en seront issues emportent l’adhésion de chacun et de tous.
C’est pourquoi, j’encourage toutes les parties prenantes à ce dialogue à privilégier l’impératif de cohésion sociale et à le concilier avec la nécessité d’agir pour l’intérêt supérieur de la Guinée.
Honorables Députés,
Distingués Invités,
Mesdames et Messieurs,
Au lendemain de la célébration du 58ème anniversaire de l’accession de notre pays à l’Indépendance, les combats politiques de nos illustres devanciers qui se sont heurtés aux défis de toutes sortes doivent être notre source d’inspiration pour nous débarrasser de nos doutes et conforter notre confiance dans le destin de notre nation.
Leurs actions fondatrices doivent être pour nous des facteurs catalyseurs qui nous condamnent à œuvrer pour la protection de notre identité commune, notre vivre ensemble au sein de cette Nation chère à chacun de nous.
Du haut de cette tribune, je vous invite, chers compatriotes, à concrétiser un pacte de confiance moral et politique liant le peuple, les élus de la nation, les hauts responsables de la République et la société civile pour une guinée pacifique et prospère, une Guinée de plein emploi pour la jeunesse, de progrès économique et social pour le peuple tout entier.
C’est sur ces mots et conformément à la tradition établie que je déclare ouverte la deuxième session ordinaire consacrée à l’examen et à l’adoption du projet de loi de finances initiale 2017.
Je vous remercie !