« La démocratie, ce
n’est pas nécessairement l’alternance » Voici la phrase du président
guinéen dans une interview qu’il a accordé à nos confrères de la libération qui
fait réagir l’ancien bâtonnier de l’ordre des avocats.
Même s’il ne nie pas que
la démocratie n’est pas forcement de l’alternance, l’avocat a tout de même fait
remarquer qu’une démocratie sans
possibilité d’alternance n’est que façade .Lisez plutôt Me Mohamed Traoré
« Dans les pays très avancés en matière de démocratie, l’alternance peut se faire à travers une élection libre et transparente. Dans ces pays, le fichier électoral n’est pas corrompu. Il ne contient ni doublons ou triplons ni fictifs ou mineurs. L’organe en charge de la gestion des élections n’est pas inféodé au pouvoir.
Il n’existe certes pas de
limitation de mandats en Allemagne ou en Israël, les pays que les partisans de
la présidence à vie aiment citer dans leur argumentation. Mais les électeurs
allemands ou israéliens peuvent provoquer à tout moment une alternance à
travers leurs simples bulletins de vote. Et il n’y a aucun risque que leur
volonté exprimée à travers les urnes soit altérée. Dans ces pays,
l’administration est totalement dépolitisée et le principe de la neutralité du
service public est une réalité. On est loin de cette réalité dans nos pays.
C’est pourquoi, l’alternance ne peut se faire chez nous, en règle générale, que
par la consécration constitutionnelle et le respect du principe de la
limitation du nombre de mandats. Il est vrai que certains pays africains sont
parvenus à une alternance par la voie des urnes mais cela relève plutôt de l’exception
surtout en Afrique francophone. Prendre les exemples de l’Allemagne et d’Israël
dénote donc une naïveté ou la mauvaise foi tout court. La démocratie ne se
résume pas à l’alternance mais sans alternance la démocratie n’est qu’une
démocratie factice. Si la démocratie est le pouvoir du peuple, aucun peuple
n’est condamné ad vitae eternam à avoir les mêmes dirigeants. Chaque peuple a
des aspirations profondes au changement. Dès lors, il n’y a pas de véritable
démocratie sans alternance.
L’alternance est si
fondamentale en démocratie que la Charte Africaine de la Démocratie, des
Élections et de la Gouvernance que la Guinée a ratifiées indique en son article
23 que tout amendement ou toute révision des constitutions ou des instruments
juridiques qui portent aux principes de l’alternance démocratique est considéré
comme un changement inconstitutionnel de gouvernement au même titre qu’une
prise du pouvoir par les armes. En Guinée, certains diront que l’on n’est pas
dans ce cas figure puisqu’il s’agit ici non pas d’un amendement ou d’une
révision de constitution mais d’un changement de constitution. Mais le résultat
est en réalité le même. C’est moins la nécessité de doter la Guinée d’une
nouvelle qui motive ce projet que les effets qu’il entraîne c’est-à-dire la
possibilité d’invoquer, en cas d’adoption de la nouvelle constitution, le
principe de non- rétroactivité de la nouvelle loi.