Qui du Gouvernement et de l’Opposition républicaine a raison sur la situation des collectivités locales ?
La déclaration faisant allusion à l’expiration du mandat des conseils communaux à l’arrivée du Président Alpha Condé, est fausse. Les dernières élections communales en Guinée ont eu lieu le 18 décembre 2005. Le code électoral en son article 113 précise « Les conseils communaux sont élus au scrutin proportionnel de listes à un tour, pour un mandat de Cinq (5) ans, renouvelable. » Par conséquent, le mandat des conseils communaux n’a expiré que le 17 Décembre 2010. Soit plus d’un mois après le 2ème tour des élections présidentielles organisées le 07 Novembre, ayant porté M. Alpha Condé au pouvoir. A rappelé le Président du Groupe Parlementaire des Libéraux Démocrates, Dr Fodé Oussou Fofana Vice-président de l’UFDG, pour apporter un démenti des arguments du Gouvernement.
Au regard du passif institutionnel de l’Etat des sept dernières années, il est important de faire une bonne lecture de la réalité politique et législative de ses institutions. Comprendre le fondement législatif de nos institutions est une très bonne chose qui revêt un avantage certain pour les amendements utiles à la manifestation du jeu institutionnel et la consolidation des acquis démocratiques.
Par cette lecture de Fodé Oussou Fofana sur le bien fondé du renouvellement et de l’élection des élus locaux et de la responsabilité du gouvernement actuel. Il pointe du doigt une responsabilité collective de la classe politique, qui depuis la disparition de Lansana Conte, la chute de son régime le 23 décembre 2008, sous la bienséance des militaires de la transition (putschistes, société politique et société civile).
Sur le cas précis des élections municipales (communales et communautaires), il est important de s’interroger sur la légalité pour mieux comprendre les conséquences juridiques actuelles.
1- De quels textes fondamentaux les actuels élus locaux tirent leur légalité?
Sur la réponse à cette première question je répondrais que c’est sur le fondement de la Loi Fondamentale de 1990 et la Loi organique L/91/012/CTRN du 23 décembre 1991 portant code électoral modifiée par les lois organiques N° L93/038/CTRN du 20 aout 1993 et N° L/95/011/CTRN du 12 mai 1995 qui a permis leurs élections (mandat en cours et en dépassement).
Qu’est ce qu’il faut tirer de la réponse à cette question, si ce n’est que de s’arrêter sur la période de la transition ouverte et conduite par les putschistes du CNDD.
L’ordonnance N°001/CNDD/2008 du 23 décembre 2008, a suspendue la Constitution de 1990 et dissout toutes les institutions qui ont été créés par elle (L.F1990). Ses conséquences sont connues de tous: dissolution de l’Assemblée Nationale, de l’exécutif, nomination d’un gouvernement de transition et d’un secrétariat permanent en vue de la gestion de la transition. Ce qui n’apparaît ou n’a pas été d’un intérêt particulier pour nos putschistes, qui pourtant devait l’être, car entrant sous le coup de l’application de l’ordonnance N°001/CNDD/2008, était la dissolution des conseillers communaux qui ont été créés par la L.F1990 au même titre que les autres.
Ceci, me renvoi encore à me poser cette deuxième question:
Quel a été le cadre législatif qui a justifié l’exercice des attributions, le fonctionnement et l’organisation des C/CRD entre le 23 décembre 2008 et le 20 décembre 2010?
Sous réserve de la présentation (justification) d’un texte qui fonde la légalité de leur existence, je dirai qu’on s’est accommodé dans le non-droit et laissé les collectivités locales continuées d’exister sur le seul fondement de la légitimité des élus locaux.
Sur la déclaration de l’honorable Fodé Oussou Fofana, Vice-président de la première force d’opposition (l’Union des Forces Démocratiques de guinée), faisant allusion à l’expiration du mandat des élus locaux de 2005, du renouvellement et de l’élection des élus, en se fondant sur les dispositions de la Loi organique L/2010/001/CNT du 24 mai 2010 en son article 113, qui précise : « Les Conseils communaux sont élus au scrutin proportionnel de listes à un tour, pour un mandat de cinq (5) ans renouvelable. ».
Pour mieux comprendre la réalité qui suscite assez de débat sur la scène politique et qui oppose le Gouvernement et l’Opposition républicaine, rappelons les faits.
« Les élections municipales dont les résultats définitifs ont été proclamées le 29 décembre 2005, par le ministre de l’administration du territoire Kiridi Bangoura, avaient connues une victoire du Parti de l’Unité et du Progrès, 31 communes urbaines des 38 et 241 des 303 communautés rurales de développement.
En mars et mai 2011, le président guinéen Alpha Condé, à peine élu, a dissout trois conseils communaux de Conakry Kaloum, Dixinn et Ratoma onze Conseils communaux des provinces et neuf Conseils communautaires pour mauvaises gestions administrative et financières, ce sont : Les communes urbaines concernées étaient: Kankan, Kouroussa, Kérouané, Beyla, Macenta, Dalaba, Boffa, Mali, Fria, Coyah et Matoto.
Pour les Communautés rurales de développement, on comptait: Tokounou dans Kankan, Maréla dans Mamou, Siguirini dans Siguiri, Gbignamou, Balizia, Kakoni dans Gaoual, Sangarédi dans Boké, Tanéné dans Dubréka et Tiro dans Faranah. »
Sur le fond du débat, il est nécessaire de corriger et de préciser certains faits qui vont nous aider dans l’analyse de cette déclaration.
A – aux termes de Loi organique L/91/012/CTRN du 23 décembre 1991 portant code électoral modifiée par les lois organiques N° L93/038/CTRN du 20 aout 1993 et N° L/95/011/CTRN du 12 mai 1995, notamment en ses dispositions des articles 102-1 « Les conseillers communautaires sont élus au scrutin proportionnel à un tours, par les habitants de la communauté rurale de développement, pour un mandat de quatre (4) ans. Le délai court à compter du dernier renouvellement de chaque conseil, qu’elle qu’ait été la date de ce renouvellement. […] » ; Et 114 – 1 « Les Conseillers communaux sont élus pour quatre (4) ans. Le délai court à compter du dernier renouvellement intégral de chaque Conseil, quelle qu’ait été la date de ce renouvellement. […] »
B – En faveur de l’évolution législative électorale, la Loi organique L/2007/AN du 19 mai 2007 adoptant et la loi portant modification du code électoral est votée par l’Assemblée Nationale. Aux termes de cette loi organique, notamment en ses dispositions des articles 102 – 1 et 114 -1, le mandat des Conseillers municipaux et communautaires et ramené à cinq (5) ans.
C – Enfin, le changement constitutionnel intervenu en 2010 et l’institution du Conseil National de la Transition, amène à l’adoption de nouvelles dispositions communes à toutes les consultations électorales. Ainsi, la Loi organique L/2010/001/CNT du 24 mai 2010, révise la loi organique L/95/011/CTRN du 12 mai 1995. Son article 113 précise « Les conseils communaux sont élus au scrutin proportionnel de listes à un tour, pour un mandat de Cinq (5) ans, renouvelable »
Etant entendu, que le fondement législatif des élections municipales de 2005, est la constitution du 23 décembre 1990 et la Loi organique L/91/012/CTRN du 23 décembre 1991 portant code électoral modifiée par les lois organiques N° L93/038/CTRN du 20 aout 1993 et N° L/95/011/CTRN du 12 mai 1995, le mandat de nos élus locaux est de quatre (4) et devait arriver à terme en décembre 2009.
Ensuite, sur le statut des collectivités locales, la Loi organique L/2010/001/CNT du 24 mai 2010, révisant la loi organique L/95/011CTRN du 12 mai 1995, portant code électoral confère et modifie l’appellation des collectivités qui deviennent sur la précision de l’article 112 « Les Communales rurales de Développement et les Communes sont désormais appelées Communes Rurales et Communautés Urbaines, administrées par des Conseils élus. »
Au regard de l’enchevêtrement législatif en matière électorale, peut – on faire prévaloir le code électoral en vigueur pour invoquer une violation de la Loi électorale ? Ou s’y plaire pour continuer à nommer des délégations spéciales ? Ou continuer à laisser les Conseillers élus à exercer ?
Sur la première question : Au regard de l’enchevêtrement législatif en matière électorale, peut – on faire prévaloir le code électoral en vigueur pour invoquer une violation de la Loi électorale ?
Il est clair que soutenir cet argumentaire revient à aller dans de l’affirmation de la rétroactivité de la nouvelle loi électorale (Loi organique L/2010/001/CNT du 24 mai 2010, révisant la loi organique L/95/011CTRN du 12 mai 1995), ce qui dans les conséquences entraine, une modification dans le sens voulu par la loi, portant sur le mandat des élus et le statut des collectivités locales.
Le débat est toutefois ouvert sur la question, ce qui à mon avis va susciter beaucoup de controverse juridique qui ne sera pas favorable à l’évolution démocratique souhaitée pour notre jeune Etat qui est dans son apprentissage pénible de cette démocratique avec ses ressources humaines et institutionnelles disponibles.
Sur la deuxième question : Peut – on s’y plaire pour continuer à nommer des délégations spéciales ?
Le principe de l’institution de la délégation spéciale est encadré dans ses motifs et sur la durée par la Loi. On ne peut pas y construire ou bâtir une quelconque gouvernance au risque d’être en violation flagrante de la loi électorale ce qui peut être de nature à affecter l’évolution de la démocratie représentative au niveau local.
L’élan démocratie enclenché en 2010, par l’élection du Président de la République et des Députés à l’Assemblée nationale en 2013 doit se poursuivre pas l’élection des Conseils communaux, ceci pour une vitalité de la démocratie représentative.
Sur la troisième question : Doit-on laisser les conseillers élus en 2005 continuer à exercer leurs missions ?
Il est clair que ces derniers, au jour d’aujourd’hui ont largement épuisés leur mandat, comme posé ci-dessus dans notre démonstration. La perte de cette légalité ne s’assimile pas avec la perte de la légitimité dont ils jouissent auprès de leurs élus. Cependant, il existe en violation de la loi qui les régit. Certes, ils ont bénéficiés des circonstances favorables, liées aux bouleversements institutionnels, législatifs et politiques. Il est temps et utile de les renouveler.
Bien que la réflexion soit plus féconde sur le débat soulevé et voulue par le Vice-président de l’UFDG, Président du groupe parlementaire des libéraux-démocrates, Fodé Oussou Fofana, les acteurs institutionnels (Gouvernement, Commission Electorale Nationale Indépendante, la société politique Opposition républicaine et Mouvance politique), doivent s’accorder dans le dialogue sur la discussion du chronogramme des élections municipales et préserver la survie et la stabilité des institutions de la République. Il faut savoir tirer les leçons de l’enchevêtrement législatif causé par l’instabilité institutionnelle depuis 2007, source d’abondance de loi sur la même matière (électorale) qui rend difficile et illisible son application effective.
L’organisation de l’élection du Président de la République en 2010 et celle des Députés en 2013, est un gage de sécurité, de clarté, de précision et de lisibilité sur la durée, l’échéance du mandat de ceux qui se sont vus investis d’un pouvoir au nom du peuple. Cela doit l’être autant pour les élections municipales. Le changement législatif intervenu en 2010, doit constituer le point de départ de l’émancipation institutionnelle de notre jeune Etat qui est confronté à un apprentissage démocratique.
Souleymane Touré Bordeaux – France
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