En marge du forum économique Guinée- Maroc de Casablanca, le ministre d’État chargé de l’économie et des finances, Mohamed Diaré, a lancé un message fort : si la Guinée veut être prise au sérieux par les Marocains, elle doit être plus offensive. Entretien !
» Le premier ministre et onze ministres ont participé au forum de Casablanca. La Guinée est stigmatisée par la presse étrangère. Elle ne parle qu’Ebola. Sa Majesté, le Roi Mohamed VI, nous a ouvert les portes de son royaume. Dans ces conditions, il fallait marquer le coup à travers une forte représentation du gouvernement guinéen. En plus, nous sommes à la croisée des chemins aujourd’hui. Nous sommes dans une dynamique de réformes pour l’émergence d’une économie forte avec une croissance accélérée dans les prochaines années. Pour y arriver, nous devons nouer des partenariats avec le Sud. Le Maroc est un pays émergent, qui a su démontrer sa capacité de résiliance face aux chocs externes et mettre des réformes pour devenir un pays émergent. Après la visite de sa Majesté à Conakry et celle du profeseur Alpha Condé à Rabat, la Guinée devait venir en grand nombre au Maroc dans ce contexte difficile que traverse notre économie, notre social, notre système sanitaire. Ceci pour être en phase avec les autorités royales et les opérateurs privés marocains.
Si le forum économique de Casablanca a réussi, c’est en raison du travail en amont. Je félicite la conseillère du président de la république chargée du secteur privé, Mme Aminata Sylla, qui à travers son équipe, a préparé d’arrache-pied à travers son homologue marocain. Au total, plus de 300 entrepreneurs privés marocains et plus de 150 leaders privés guinéens. Nous avons organisé en novembre 2013 à Abou Dhabi, un forum parfaitement réussi. C’est dire que nous sommes dans une dynamique qui nous permet sans démagogie, avec la gouvernance du professeur Alpha Condé, d’être à la hauteur et à la dimension dans la tenue de telles rencontres, que ce soit en Guinée ou à l’extérieur. En marge de la visite de sa Majesté, le Roi Mohamed VI, à Conakry, nous avions organisé une rencontre économique. En plus, il y a eu la réunion du conseil des ministres des pays de l’OCI à Conakry. Nous sommes tournés résolument vers une dynamique, qui permet aujourd’hui à la Guinée de concurrencer les autres Etats, de faire valoir notre savoir-faire. Bien sûr, tout n’est pas encore gagné. Mais nous sommes dans un apprentissage, qui est salué par tous nos partenaires.
Les acquis de ce forum sont multiples. D’abord, cela montre qu’on ne parle pas seulement d’Ebola en Guinée mais plutôt d’économie. . Ensuite, il était question pour nous de faire le point sur l’ensemble des conventions signées en mars dernier à Conakry pour savoir où en sommes-nous, quels sont les points d’obstacle et comment les impulser pour aller vite. Autres acquis, c’est la signature dune dizaine de nouvelles conventions avec le secteur privé marocain. Le développement économique de la Guinée doit se reposer sur le secteur privé local.
Dans mon département, nous n’avons pas signé de nouvelles conventions à Casablanca mais à Conakry, nous avions signé une convention de non-double imposition que nous avions transmise à l’Assemblée nationale pour ratification. Cette convention rentre en vigueur en principe en janvier 2015. Mais pour qu’elle entre en vigueur, il faut que les deux États puissent la faire ratifier par leur organe législatif respectif. En marge de mon séjour, j’ai fait le point avec mon homologue marocain pour voir où en sommes-nous dans le cadre de la ratification de la convention de non-double imposition, qui rassure les privés guinéens et marocains. Au Maroc, ils sont en voie de ratification pour qu’elle entre en vigueur à partir de 2015.
En plus, lors de la visite du ministre marocain de l’économie et des finances à Conakry, je lui avait remis le programme de réformes de nos finances publiques sur trois ans. Aujourd’hui, nous avons discuté pour voir comment le Maroc peut concrétiser un renforcement de capacités au niveau de notre ministère surtout la direction des études économiques et de la prévision et également la direction du patrimoine de l’État et des investissements publics où on peut structurer les mécanismes de financement, que ce soit le secteur privé ou le secteur public.
Donc, au-delà de la signature des conventions à Casablanca, nous avons fait le point de tous les accords signés en vue d’aider à l’accélération de leur mise en œuvre. Du côté guinéen, le président de la république a mis en place un comité de suivi des accords et conventions signés avec le Maroc. Tous les ministres principaux font partie de cette commission, qui doit se réunir une fois par trimestre. Du côté marocain également. Pour y arriver, côté guinéen, il faut travailler dans son secteur avant de faire le compte-rendu. D’ici deux à trois mois, il n’est pas exclu que l’on puisse faire des échanges avec la partie marocaine pour ne pas signer des accords et les oublier dans les tiroirs. Le signal a été donné de façon solennelle et forte par les deux Chefs d’État respectifs. Sa majesté le roi du Maroc a mis en place un comité de suivi, qui est présidée par le ministre des affaires étrangères et de la coopération. En Guinée, c’est le ministre d’État, ministre directeur de cabinet de la présidence. Je suis membre du comité de suivi tout comme les ministres de l’agriculture, des transports… Nous ferons en sorte que tous ces accords ne ressemblent pas à ce qu’on a l’habitude de voir chez nous, c’est-à-dire le manque de suivi. Il y a un problème de crédibilité en jeu avec la partie marocaine. Pour que la Guinée soit prise au sérieux par nos frères Marocains, il faudrait que nous puissions être nous-mêmes plus offensifs dans le cadre de la mise en œuvre de ces accords. »