De la division à l’unité : l’héritage du mur de Berlin 35 ans plus tard !(Par Aboubacar SAKHO)
http://Actuguinee.org / Le 9 novembre 2024 marque les 35 ans de la chute du mur de Berlin, un événement marquant de la fin du 20ᵉ siècle qui symbolise l’aspiration à la liberté et à l’unité. Construit pour empêcher les citoyens de la RDA (République Démocratique Allemande) de fuir vers l’Ouest, le mur incarnait le clivage entre deux idéologies rivales.
Retour sur les conséquences de la séparation, les précurseurs de sa chute et l’impact durable de cet événement.
Le mur de Berlin fut érigé dans la nuit du 12 au 13 août 1961, par les autorités est-allemandes sous la direction de Walter Ulbricht, chef du Parti socialiste unifié de la RDA, avec l’approbation de Nikita Khrouchtchev, dirigeant de l’Union soviétique. Ulbricht est souvent considéré comme le principal instigateur de cette « barrière de protection antifasciste », construite pour mettre fin à l’exode massif de citoyens de l’Est vers l’Ouest. Ce mur, long de plus de 155 km, incluait des barrières, des miradors et des patrouilles armées, rendant presque impossible tout passage vers la liberté à l’Ouest.
La construction du mur renforça la polarisation entre l’Est et l’Ouest, cristallisant l’opposition entre les États-Unis et l’URSS en Allemagne. Le mur devint un outil de propagande pour les deux camps : pour l’Ouest, il symbolisait l’oppression communiste, tandis que pour l’Est, il servait de bouclier contre l’« influence fasciste » de l’Ouest. Militairement, le mur accentua la présence militaire à Berlin et en Europe, avec les Alliés occidentaux stationnés en RFA et l’armée soviétique en RDA. Les tensions atteignirent des sommets lors de la crise de Berlin de 1961, un face-à-face tendu entre les forces américaines et soviétiques qui raviva les craintes de guerre.
La séparation aggrava les disparités économiques entre les deux Allemagnes. Tandis que la RFA bénéficiait du plan Marshall et connaissait un essor économique rapide, la RDA, sous un régime centralisé et autoritaire, souffrait d’une stagnation économique et d’une pénurie de biens de consommation, accentuant le mécontentement de la population.
La division de Berlin eut des conséquences humaines profondes. Des familles furent séparées, et des milliers de Berlinois de l’Est risquèrent leur vie pour traverser la frontière. Le mur symbolisait une tragédie humaine, renforçant le sentiment de privation de liberté dans les pays du bloc de l’Est. Diplomatiquement, le mur créa un isolement de la RDA sur la scène internationale. La RFA, soutenue par les Alliés, renforça ses alliances avec les pays occidentaux, tandis que la RDA fut contrainte de se tourner exclusivement vers l’Union soviétique et les autres pays socialistes, restreignant ainsi son influence et ses échanges extérieurs.
●Les prémices de la chute
Les années 1980 furent marquées par une vague de réformes au sein de l’Union soviétique. Mikhaïl Gorbatchev, en introduisant la Glasnost (transparence) et la Perestroïka (restructuration), encouragea une ouverture politique dans les pays du bloc de l’Est. Les manifestations en Pologne, en Hongrie et en Tchécoslovaquie influencèrent les citoyens de la RDA, qui commencèrent à manifester pour plus de liberté et de réformes. En 1989, les manifestations pacifiques s’intensifièrent, en particulier à Leipzig avec les célèbres « manifestations du lundi ». Sous la pression croissante, les autorités est-allemandes furent contraintes de céder, conduisant à la célèbre soirée du 9 novembre où, suite à une erreur de communication, le mur fut ouvert.
Toujours à la même année, c’est-à-dire en 1989, Helmut Kohl dirigeait la République Fédérale d’Allemagne (RFA), tandis qu’Egon Krenz était le chef d’État de la RDA, succédant à Erich Honecker peu avant la chute du mur. Kohl se saisit rapidement de cette opportunité historique, lançant un processus de réunification qui aboutira le 3 octobre 1990.
●Les retombées positives de la chute du mur
En Allemagne : La chute du mur marqua la fin de la division et ouvrit la voie à la réunification. Bien que difficile et coûteuse, elle permit de rétablir les liens familiaux et sociaux entre les Allemands, jetant les bases d’une nation unie et économiquement forte, aujourd’hui leader en Europe.
■En Europe : Cet événement symbolique fut le point de départ d’une série de révolutions pacifiques à travers l’Europe de l’Est. Des régimes communistes tombèrent en Tchécoslovaquie, en Roumanie, et d’autres États du bloc soviétique. L’Europe orientale, autrefois sous le joug soviétique, s’ouvrit à la démocratie et entama des rapprochements avec l’Union européenne, contribuant à la paix et à la stabilité sur le continent.
■En Afrique : La fin de la guerre froide changea le paysage politique en Afrique, réduisant l’influence idéologique des superpuissances. Plusieurs pays africains en bénéficièrent, avec un recul des conflits de proxy et une ouverture à la démocratie. L’aide au développement se diversifia, stimulant les échanges économiques et la coopération internationale.
■Dans le monde : Globalement, la chute du mur de Berlin symbolisa la fin de la guerre froide. Les relations internationales se réorientèrent vers le dialogue, et les tensions nucléaires s’apaisèrent, permettant une plus grande coopération économique et culturelle. La mondialisation s’accéléra, tout comme les échanges commerciaux et culturels.
■Trente-cinq ans après, un héritage contrasté
Trente-cinq ans plus tard, la chute du mur de Berlin reste un symbole de liberté, d’espoir et d’unité. L’Allemagne est devenue une puissance économique et politique en Europe. Cependant, des disparités persistent entre l’ancienne RDA et la RFA, et des résurgences de tensions politiques en Europe rappellent que l’idéologie de division n’est jamais totalement éradiquée.
Le mur de Berlin, autrefois témoin de la séparation et de l’oppression, demeure aujourd’hui un symbole universel d’unité et de résilience face aux divisions idéologiques. Sa chute enseigne l’importance de l’ouverture et du dialogue, incitant le monde à choisir l’union et la liberté plutôt que la séparation et la méfiance.
Par Aboubacar SAKHO
Juriste-journaliste